L’accès à la propriété connaît sa pire détérioration depuis 27 ans
L’accès à la propriété au Canada ne s’est jamais autant détérioré depuis « une génération » durant les trois premiers mois de l’année, selon un indice développé par l’équipe d’économistes de la Banque Nationale.
Son indice d’accessibilité au logement a connu sa pire détérioration au premier trimestre depuis 27 ans, souligne leur étude publiée, mercredi. Sur 12 mois, c’est la pire détérioration en 40 ans.
Déjà malmenée, l’accessibilité s’est détériorée tandis que la hausse des taux hypothécaires s’est ajoutée à un contexte d’appréciation des prix de l’immobilier résidentiel, explique le chef économiste adjoint de la Banque Nationale, Matthieu Arseneau. « On parle d’une hausse du prix des maisons de 5,1 % et d’un taux hypothécaire fixe de cinq ans de 46 points de base au cours du trimestre. »
Résultat, c’est la première fois depuis 1994 qu’un ménage de nouveaux acheteurs qui gagne un revenu médian devrait consacrer plus de 50 % de ses revenus au remboursement de son hypothèque s’il achetait une maison « représentative » de son marché local.
« Il y a quand même eu une frénésie, commente l’économiste. Les prix se sont emballés et dépassent les fondamentaux, quand on tient compte des revenus et des taux d’intérêt au cours des derniers trimestres. »
À Montréal, par exemple, un ménage médian devait économiser 10 % de ses revenus pendant 51 mois (plus de quatre ans) pour obtenir la mise de fonds minimal. Dans la métropole, l’accessibilité au logement s’est détériorée pour un sixième trimestre consécutif pour atteindre son pire niveau depuis 1991.
La situation est toujours pire à Vancouver et Toronto où le ménage médian devrait épargner 452 mois (plus de 37 ans) et 363 mois (plus de 30 ans), respectivement, pour avoir la mise de fonds nécessaire pour acheter une maison représentative de leur marché.
Un effet sur les prix et l’économie
Avec la hausse des taux d’intérêt, M. Arseneau s’attend à une modération des prix de l’immobilier. Il souligne que l’indice de l’accès au logement utilise le taux hypothécaire fixe de cinq ans pour mesurer l’abordabilité. Or, bien des ménages ont choisi de contracter une hypothèque à taux variables, dont le taux était inférieur au cours du trimestre, pour accéder au marché.
« Ils [les nouveaux acheteurs ayant choisi un taux variable au premier trimestre] ont pu éviter la hausse des taux, ce qui a pu pousser encore à la hausse les prix des maisons, mais avec la Banque du Canada, qui est en processus de relèvement des taux d’intérêt, il n’y aura plus moyen de se cacher et ça devrait se refléter pour les prix de l’immobilier au Canada. »
Pour contrôler l’inflation, la Banque du Canada a commencé à relever son taux directeur en mars. Le taux qui était à 0,25 % depuis 22 mois a été relevé à deux reprises depuis pour s’établir à 1 %. La prochaine décision de la banque centrale aura lieu le 1er juin. La Banque Nationale prévoit que le taux directeur atteindra 2,5 % d’ici la fin de l’année.
L’économiste ne craint pas que l’augmentation des paiements hypothécaires des ménages ne fasse plonger l’économie pour le moment. « C’est clair que pour certains ménages, c’est quand même des factures beaucoup plus salées, mais au niveau macro-économique l’impact pour 2022, c’est 0,4 % du revenu disponible [selon les prévisions de la Banque Nationale]. Ça ne veut pas dire que la consommation est compromise, oui ça va freiner la consommation, mais c’est quand même gérable. »
La Presse
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